Le projet de loi dans sa dernière version, tente de définir les JONUM et propose de mettre en place un cadre expérimental pendant une durée de trois ans, destiné à créer un équilibre entre l’innovation et les risques inhérents aux jeux d’argent et de hasard. Toutefois, les discussions se poursuivent sur l’opportunité de ce cadre expérimental.
Le projet de loi visant à sécuriser et réguler d’espace numérique avait été présenté le 10 mai 2023 en conseil des ministres, examiné par le Sénat, amendé, puis transmis à l’Assemblée Nationale le 7 juillet 2023. La commission spéciale chargée de l’examen du texte a adopté un projet de loi intégrant de très nombreux amendements.
Le projet de loi couvre des sujets divers (mise en œuvre d’un filtre de cybersécurité anti-arnaque, renforcer les sanctions des personnes condamnées pour cyberharcèlement, renforcer le dispositif visant à faire respecter les limites d’âge en ligne pour l’accès aux sites pornographiques - sanctionner les sites en cas de non-retrait de contenus pédopornographiques en ligne, restaurer l’équité commerciale sur le marché du cloud, apporter des protections nouvelles contre la désinformation et les ingérences étrangères, adapter le droit national aux règlements DSA et DMA).
Il contient également plusieurs articles visant à « assurer le développement de l’économie des objets de jeux numériques monétisables dans un cadre protecteur » (titre IV). Le projet de loi initial, prévoyait de manière succincte, que ce sujet serait réglé par voie d’ordonnance (article 15). Toutefois, le Sénat a supprimé ce renvoi et a proposé plusieurs amendements, lesquels ont ensuite été modifiés et largement complétés par la commission spéciale de l’Assemblée nationale.
Les mesures visent à s’adapter à l’apparition des JONUM ou Jeux à Objets Numériques Monétisables. Il s’agit notamment des Play to earn, ces jeux fonctionnant grâce à la blockchain et aux NFT, dans lesquels l’achat d’objets numériques permet de jouer, de progresser dans le jeu et de gagner de nouveaux objets numériques (des cartes par exemple).
Jusqu’alors, il n’existait pas de définition juridique ni de cadre de régulation pour ces nouveaux types de jeux, qui sont à la croisée des jeux vidéo « traditionnels » et des jeux de hasard, définis de la façon suivante :
« Est considéré comme un jeu vidéo, tout logiciel de loisir mis à la disposition du public sur un support physique ou en ligne intégrant des éléments de création artistique et technologique, proposant à un ou plusieurs utilisateurs une série d'interactions s'appuyant sur une trame scénarisée ou des situations simulées et se traduisant sous forme d'images animées, sonorisées ou non ».
Article 220 terdecies du Code général des Impôts
« Sont réputés jeux d’argent et de hasard et interdits comme tels, toutes opérations offertes au public, sous quelque dénomination que ce soit, pour faire naître l'espérance d'un gain qui serait dû, même partiellement, au hasard et pour lesquelles un sacrifice financier est exigé de la part des participants ».
Article L 320-1 du Code de la sécurité intérieure modifié par l’ordonnance du 2 octobre 2019.
Dès lors, les JONUM offerts au public, qui font naitre l’espérance d’un gain - même partiellement dû au hasard - et qui nécessitent un sacrifice financier, pourraient être considérés comme des jeux de hasard et interdits. L’absence de définition pourrait être source d’incertitude pour les acteurs du jeu français et brider ce secteur porteur.
Pour tenter de limiter cette zone d’ombre, le texte dans sa dernière version provisoire proposait :
Toutefois, plusieurs conditions (issues notamment de l’article 15 bis intégré par l’Assemblée nationale) sont posées, qui portent notamment.
– Sur les personnes morales qui entendent proposer au public une offre de jeux. Celles-ci doivent notamment :
– Sur les modalités d’ouverture et de gestion des comptes, sur les types de jeux autorisés à titre expérimental, les types de récompense qui peuvent être attribuées aux joueurs (y compris aux éventuels plafonnements) (les règles seront fixées par décret pris en Conseil d’Etat, le cas échéant après avis de l’Autorité nationale des jeux ou de la CNIL).
– Enfin, les objets numériques monétisables émis par une entreprise de jeux, ne doivent pas pouvoir être cédés, directement ou indirectement par l’intermédiaire de toute personne physique ou morale, à titre onéreux ni à l’entreprise qui les a émis, ni à une personne physique ou morale agissant de concert avec elle, ou qu’elle contrôle.
Ce texte fait désormais l’objet de discussions en séances publiques. Celles-ci s’annoncent particulièrement animées puisque certains amendements, visent à supprimer la période d’expérimentation prévue pour les JONUM, voire l’article 15 dans son intégralité.