Le 26 avril dernier, l’autorité de la concurrence britannique (CMA) avait exprimé des préoccupations quant à l’acquisition d’Activision par Microsoft, puis émis un veto bloquant cette opération.
L’un des sujets mis en avant par la CMA était la position forte qu’occupe Microsoft sur le marché du cloud gaming (ou Streaming de jeu en nuage) et les risques concurrentiels que pourrait générer l’acquisition d’un éditeur de jeu disposant de licences de grande qualité (Call of Duty1, World of Warcraft, Overwatch, Diablo, dites AAA) proposées sur de nombreuses plateformes (consoles de jeux, PC, mobiles).
Les garanties alors apportées par Microsoft afin de minimiser ces risques, n’avaient pas été jugées suffisantes par l’autorité britannique.
La Commission Européenne a une analyse différente de la situation.
Elle indique dans son communiqué :
« La Commission européenne a autorisé, en vertu du règlement de l'UE sur les concentrations, le projet d'acquisition d'Activision Blizzard («Activision») par Microsoft. L'autorisation est subordonnée au respect intégral des engagements proposés par Microsoft.
Les engagements remédient pleinement aux problèmes de concurrence soulevés par la Commission et représentent une nette amélioration par rapport à la situation actuelle en ce qui concerne les jeux en nuage ».
« Les jeux vidéo attirent des milliards d’utilisateurs dans le monde entier. Dans un secteur aussi dynamique et qui évolue aussi rapidement, il est essentiel de protéger la concurrence et l’innovation. Notre décision constitue un pas important dans cette direction, en mettant les jeux populaires d’Activision à la disposition de bien plus d'appareils et de consommateurs qu’auparavant grâce au streaming de jeux en nuage.
Les engagements proposés par Microsoft permettront pour la première fois la diffusion en streaming de ces jeux par n'importe quel service de streaming de jeux en nuage, ce qui renforcera la concurrence et les possibilités de croissance ».
Margrethe Vestager,
vice-présidente exécutive chargée de la politique de concurrence - 15/05/2023
Pour mémoire, une enquête approfondie avait été menée par la Commission et avait notamment laissé apparaitre que:
Pour remédier à ces risques d’atteinte à la concurrence, Microsoft avait proposé plusieurs mesures correctives, dont l’engagement de consentir pendant une durée de 10 ans :
La Commission a estimé que ces engagements étaient de nature à remédier aux problèmes de concurrence soulevés, qu’ils représentaient une nette amélioration pour le cloud gaming par rapport à la situation actuelle (Activision ne concédant pas à ce jour de licence sur ses jeux aux services de cloud gaming et ne les diffuse pas elle-même) et stimuleraient le développement de cette technologie dans l’Espace Economique Européen.
La position de la Commission, qui concerne le marché européen, est donc opposée à celle de l’autorité britannique, qui concerne le marché anglais. Microsoft a déjà indiqué qu’il ferait appel de la décision de la CMA et invoquera sans doute la décision de la Commission européenne. La CMA a pour sa part indiqué, après avoir pris connaissance de l’avis de la Commission, qu’elle s’en tenait à sa position.
Enfin, la position de l’autorité de la concurrence américaine, et de l’autorité chinoise sont attendues, et seront aussi importantes pour l’opération.
1 L’autorité américaine de la concurrence indique que les différentes versions du jeu Call of Duty auraient généré entre 2003 et 2020, USD 27 milliards de revenus. Le contenu produit par Activision serait extrêmement important pour les fabricants de consoles.
2 La FTC, a notamment relevé que Microsoft avait également avancé lorsqu’elle avait acquis ZeniMax, qu’elle n’avait aucun intérêt à retenir les titres proposé mais que lorsque la Commission avait autorisé la transaction, Microsoft avait gardé l’exclusivité sur des titres tels que Starfield Redfall et Elder Scrolls VI (§12).Une telle restriction d’accès pourrait aller à l’encontre de la politique d’Activision qui est d’offrir ses jeux le plus largement possible.