Il est désormais possible de faire effacer les données qui nous concernent via Google !
Cette annonce a eu un effet retentissant sur la toile et de nombreux utilisateurs se sont empressés de tester le nouvel outil mis en place par Google1 : le formulaire de « droit de suppression des données » de Google.
Sous réserve de prouver son identité et d’identifier le lien litigieux aux services de Google, il est désormais possible de faire effacer les résultats de recherche qui incluent notre nom et qui seraient « inadéquats, pas ou plus pertinents ou excessifs au regard des finalités du traitement ».
Ceci résulte de l’arrêt rendu dans une affaire « Google Espagne » par la Cour de Justice de l’Union Européenne réunie solennellement en grande chambre, le 13 mai 2014 dans un litige l’opposant à l’Agence espagnole de protection des données (l’équivalent hispanique de notre CNIL).
Dans cette affaire, un particulier souhaitait voir disparaitre du moteur de recherche la mention de son nom associée à une ancienne procédure d’adjudication sur saisie immobilière pour recouvrement de dettes. Revenu à meilleure fortune, il estimait en effet que ces informations portaient atteinte à sa vie privée.
Il a donc saisi l’Agence espagnole de protection des données en 2009 dans un contentieux qui, de procédure en procédure, a finalement été tranché par la Cour de Justice de l’Union européenne.
Sur le plan juridique, la Cour a opéré un contrôle classique entre l’intérêt légitime des internautes d’accès à l’information et les droits fondamentaux d’une personne au respect de sa vie privée et à la protection de ses données à caractère personnel, conformément aux articles 7 et 8 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.
La Cour considère in fine que lesdits articles de la Charte, repris notamment par la directive 95/46/CE relative à la protection des personnes physiques à l’égard des données à caractère personnel, oblige l’exploitant d’un moteur de recherche à supprimer de la liste de résultats, affichée à la suite d’une recherche effectuée à partir du nom d’une personne, des liens vers des pages web contenant des informations la concernant.
Pédagogue et solennelle, la Cour précise qu’un tel droit d’effacement des données est possible en l’absence de tout préjudice causé à la personne en cause et même lorsque la publication des pages est licite.
Tirant les conclusions de l’arrêt, Google a donc élaboré un formulaire – à destination des européens uniquement – permettant d’identifier les informations qu’ils souhaiteraient voir disparaitre des résultats affichés par le moteur de recherche.
Evidemment très exposée à la critique sur le terrain de la problématique des données personnelles en tant qu’acteur important du Web2, Google se propose d’être exemplaire en se réservant la possibilité de transférer toute demande d’effacement des données aux autorités nationales compétentes, et ainsi de se faire l’auxiliaire de justice des agences de protection des données personnelles !
Pour autant, ce questionnaire suscite de nombreuses interrogations.
Ainsi Google se réserve de déterminer quels résultats sont « inadéquats, pas ou plus pertinents ou excessifs au regard des finalités des traitements » selon son formulaire, afin le cas échéant de ne pas donner suite à la demande d’effacement. Mais comment cette appréciation sera-t-elle effectuée ? Qui in fine en décidera ?
Signe de la très grande réactivité de Google, ce formulaire va générer une pratique qui sera à n’en pas douter source de nombreux questionnements.
1 Plus de 12.000 demandes auraient ainsi été formulées hier selon une étude réalisée par le quotidien Le Monde.
2 Pour rappel, Google avait été condamnée par la CNIL le 3 janvier 2014 à 150 000 euros d’amende et surtout à devoir indiquer sa condamnation sur son moteur de recherche par un lien renvoyant sur le site de la CNIL, qui ne l’avait pas supporté et avait planté, tant le flux des données était important.