Les fabricants de denrées alimentaires sont tenus d’informer les consommateurs sur les ingrédients qui entrent dans la composition d’un produit.
Ils ont parfois un intérêt commercial à mettre en avant cet ingrédient – par exemple dans la dénomination du produit – lorsqu’il est synonyme de qualité ou protégé par une appellation d’origine.
L’arrêt de la CJUE du 20 décembre 2017 apporte un éclairage sur cette pratique.
La Cour a été saisie d’une demande de décision préjudicielle au sujet d’un sorbet vendu par Aldi sous le nom Champagner Sorbet, composé de 12 % de champagne.
Le CICV, association des producteurs de champagne, a considéré que l’utilisation de l’appellation d’origine champagne dans des sorbets, contrevenait aux dispositions des Règlements 1234/2007 et 1308/2013 et a engagé une action devant les juridictions allemandes.
La juridiction de première instance a fait droit à la demande du CICV, mais sa décision a été infirmée en appel, la Cour ayant considéré que la condition d’utilisation déloyale de l’appellation protégée n’était pas remplie et qu’Aldi avait un intérêt légitime à utiliser cette dénomination. L’arrêt de la Cour d’appel a été critiqué devant la Cour fédérale, laquelle a prononcé un sursis à statuer et a saisi la CJUE de demandes préjudicielles.
La CJUE a répondu de la façon suivante aux questions qui lui étaient posées et a dit pour droit que l’utilisation d’une AOP – telle que « Champagne » – comme partie de la dénomination sous laquelle est vendue une denrée alimentaire qui ne répond pas au cahier des charges relatif à cette AOP mais qui contient un ingrédient répondant audit cahier des charges – telle que Champagner Sorbet – :
La Cour a précisé que l’ingrédient en cause devait avoir été ajouté en quantité suffisante pour conférer à la denrée alimentaire concernée une caractéristique essentielle telle que l’arôme ou le goût et que, si un autre ingrédient déterminait d’avantage le goût du produit, l’utilisation d’une telle dénomination serait indue en ce qu’elle tirerait indument profit de la réputation de l’appellation (pt.50-52), voire constituerait une indication fausse ou fallacieuse sur l’origine du produit, sa nature ou ses qualités substantielles (quatrième question – article 118.quater.2.c. R.1234/2007 et article 103§2.c. R.1308/2013) ;
En revanche, la Cour a considéré qu’un tel usage ne pouvait constituer une usurpation, une imitation ou une évocation de l’appellation d’origine, dans la mesure où l’appellation était utilisée directement et qu’il était revendiqué une qualité gustative liée à celle-ci (troisième question – article 118.quater.2.b R.1234/2007 et article 103§2.b R.1308/2013).
Les dénominations et les conditionnements des produits fabriqués ou vendus, mettant en avant une appellation protégée doivent donc être conçus avec circonspection !