Le projet de loi pour la croissance et l’activité, dit « Projet de loi Macron », prévoit deux dispositions attribuant de nouvelles compétences à l’Autorité de la concurrence (ADLC) concernant l’urbanisme commercial et le secteur de la grande distribution.
La Commission d’étude des effets de la loi pour la croissance et l’activité, présidée par Madame Anne Perrot, ancienne vice-présidente de l’Autorité de la concurrence, a rendu des conclusions mitigées concernant les effets de ces deux mesures sur les prix à la consommation, le bien-être des consommateurs, l’emploi, la productivité, l’innovation et la sécurité juridique.
La Commission a accueilli favorablement la première disposition en ce qu’elle élargit le champ du rôle d’ « advocacy » de l’ADLC à la documentation d’urbanisme commercial qui lui permettra de « veiller à ce que cette documentation laisse suffisamment de place à l’entrée sur le marché et favorise un degré de concurrence locale plus élevé » et aura un effet favorable en termes de concurrence locale entre les distributeurs, d’accroissement du bien-être des consommateurs et de productivité.
Il est toutefois à noter que la Commission a lié expressément l’efficacité du dispositif au pouvoir d’auto-saisine de l’ADLC. Or, avant même que la Commission n’ait rendu son rapport, la Commission Spéciale de l’Assemblée nationale avait déjà supprimé de l’article 10 du Projet la faculté d’auto-saisine de l’ADLC qui, en l’état du texte, ne pourra donc être saisie que par le Ministre de l’économie ou le préfet.
La Commission a rendu un avis beaucoup moins favorable concernant la seconde disposition considérée comme porteuse de risques en termes de sécurité juridique et de liberté des prix.
Tout d’abord, la Commission a rappelé que le droit de la concurrence ne condamne jamais la position dominante en tant que telle, mais seulement l’abus qui peut en être fait, et qu’il a pour vocation de ne pas décourager l’initiative économique, l’investissement et l’innovation en sanctionnant une position dominante qui serait acquise par les seuls mérites et dont il ne serait pas abusé.
Or, « même si l’article 11 ne prévoit pas de sanction pécuniaire, l’injonction de cession d’actifs s’apparente à une forme de sanction. Son mécanisme peut donc être dangereux pour l’investissement et la vie économique ».
De plus, la Commission a souligné que l’ADLC s’est toujours refusée à indiquer ce qu’est en tant que tel un « prix normal » et, par opposition, ce que serait un « prix anormal ». En effet, dans un régime de libre concurrence les prix résultent d’une combinaison complexe dont les principaux ingrédients sont les conditions de l’offre (coûts), celles de la demande, et le jeu concurrentiel qui s’exerce entre les acteurs.
Or « le mécanisme prévu par l’article 11 amène l’Autorité à définir ce que sont des « prix élevés », aqui sont en outre susceptibles de sanction. On peut d’ailleurs imaginer que les entreprises qui feraient face à une mise en oeuvre de cet article préféreraient prendre un engagement visant à éviter la pratique de « prix élevés » plutôt que risquer une injonction de cession d’actifs. Ainsi, il existe un risque que ce mécanisme ramène de manière détournée à une forme partielle d’administration des prix ».
Les effets des deux dispositions susvisées du Projet de loi Macron sont récapitulés dans le schéma ci-dessous :