Par une ordonnance n° 2021-1193 du 15 septembre 2021 et son décret d’application n° 2021-1218 du 23 septembre 2021, le droit des entreprises en difficulté a été réformé.
Pris sur habilitation de la loi PACTE du 22 mai 2019, ces nouveaux textes visent à :
Les dispositions de la réforme sont entrées en vigueur le 1er octobre 2021, et sont applicables aux procédures ouvertes depuis de cette date.
Cette réforme tend à rapprocher les réglementations des Etats européens et poursuit un objectif d’équilibre entre les intérêts des créanciers et ceux des débiteurs et des garants.
Les nouvelles mesures sont variées et souvent techniques. Nous les présentons ci-après de manière succincte et non exhaustive.
Le commissaire aux comptes a désormais la possibilité d’informer le président du tribunal compétent dès la première information exposant des faits pouvant compromettre la continuité de l’activité. Cette mesure, initialement prévue pour faciliter les échanges lors de la crise sanitaire de Covid-19, est pérennisée par la réforme (art. L.611-2-2 nouv. C.com).
Le tribunal pourra imposer des délais de grâce à l’égard des créanciers qui refusent de suspendre l’exigibilité de leur créance lors de la procédure de conciliation. Ainsi, le débiteur pourra demander au juge de reporter ou échelonner le règlement des créances non échues dans la limite de la durée de la mission du conciliateur. Cette mesure vient également pérenniser l’une des mesures de l’ordonnance prise pour les besoins de la crise sanitaire (art. L.611-7 al. 5 nouv. C.com).
La durée de la période d’observation maximale initialement fixée à 18 mois sera désormais de 12 mois (art. L.621-3 nouv. C.com). Notons, que cette mesure est uniquement applicable à la sauvegarde, par conséquent la prolongation jusqu’à 18 mois est toujours possible dans le cadre d’un redressement judiciaire.
La réforme fait disparaître la « sauvegarde financière accélérée » et fait subsister la « sauvegarde accélérée ». La durée de cette dernière est limitée à 4 mois et est ouverte à toutes les entreprises quelle que soit leur taille (art. L.628-1 nouv. C.com ; art. L.628-8 nouv. C.com). Cette mesure pérennise une mesure de l’ordonnance (Covid-19) qui avait supprimé les seuils d’ouverture pour adapter cette procédure à la crise sanitaire.
Le comité des créanciers fait désormais place aux « classes de parties affectées » qui concernent non seulement les créanciers, mais aussi les actionnaires et autres détenteurs de capital. La constitution des classes n’est plus fonction de la qualité des créanciers, mais d’une « communauté d’intérêt économique suffisante », qui justifie de les regrouper. L’administrateur judiciaire a pour mission de constituer les classes et dispose d’une certaine souplesse pour adapter au mieux le dispositif à chaque dossier.
L’adoption du plan par les « classes » fait l’objet de plusieurs dispositions visant à permettre un équilibre entre la protection des créanciers et le succès de la procédure. A noter, la possibilité pour le tribunal d’arrêter un plan en dépit du vote négatif d’une ou plusieurs classes.
La mise en place de ces classes sera obligatoire et automatique pour la procédure de sauvegarde accélérée et conditionnée au franchissement de certains seuils en cas de sauvegarde et redressement judiciaire (i.e., entreprise employant au moins 250 salariés et réalisant un chiffre d’affaires au moins égal à 20 millions d’euros ou réalisant, avec les entités qu’elle contrôle, un chiffre d’affaires d’au moins 40 millions d’euros).
En dessous de ces seuils, la constitution des classes de créanciers devrait rester facultative, ce qui signifie, pratiquement, que lesdites « classes » ne seront mises en place que dans les dossiers significatifs.
La réforme du droit des entreprises en difficulté, qui s’articule avec celle du droit des sûretés, modifie les dispositions du livre VI du Code de commerce relatives aux sûretés. Ces modifications concernent le traitement des sûretés avant et après l’ouverture de la procédure collective (une fois la procédure ouverte, les sûretés sont soumises à un régime juridique spécifique au droit des entreprises en difficulté).
Ainsi, notamment :
– Le sort des garants est amélioré en ce qu’ils bénéficieront plus aisément des délais de grâce accordés au débiteur en procédure de conciliation ( L.611-10-2 nouv. C.com) ;
– Le régime des nullités de la période suspecte de plein droit est modernisé afin de soumettre à ces nullités, l’ensemble des sûretés réelles conventionnelles et tout droit de rétention conventionnel, cela afin d’améliorer la protection du gage commun des créanciers ( L.632‑1 nouv. C.com) ;
– Afin de favoriser le financement de la période d’observation :
– Le champ d’application de l’interdiction des poursuites est étendu : le bénéficiaire d’une sûreté réelle, constituée par le débiteur en garantie de la dette d’autrui, est dorénavant soumis à l’arrêt des poursuites et devra déclarer sa créance ;
– Le nouvel article 622-34 du Code de commerce confère aux garants personnes physiques, la possibilité de procéder, même avant paiement, à la déclaration de leur créance pour la sauvegarde de leur recours personnel ;
– Enfin, plusieurs mesures visent à faciliter le rétablissement des dirigeants.