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Actualité
1/12/23

La loi de transposition de l’ANI du 10 février 2023 sur le partage de la valeur est publiée !

La loi n°2023-1107 du 29 novembre 2023 portant transposition de l’Accord National Interprofessionnel du 10 février 2023 sur le partage de la valeur au sein de l’entreprise vise à améliorer l'équilibre entre travail et capital, en particulier dans les TPE-PME.
Elle introduit un nouveau dispositif le PPVE, inspiré des "Phantom Stocks Plan", elle crée une obligation de négocier sur l’augmentation exceptionnelle du bénéfice, elle autorise une dérogation à la formule légale de la participation pour certaines entreprises, elle prolonge le régime d’exonération de la PPV, elle crée une obligation d’instituer un dispositif de partage de la valeur, elle sécurise les avances sur intéressement et participation et développe l’actionnariat salarié.

La loi n°2023-1107 du 29 novembre 2023 portant transposition de l’accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise du 10 février 2023, adoptée par l’Assemblée nationale le 22 novembre 2023, vient d’être publiée au JORF n°0277 du 30 novembre 2023. 

Les entreprises vont devoir rapidement ouvrir le chantier du partage de la valeur.  

La question du partage de la valeur au sein de l’entreprise est une tâche ancienne (intéressement en 1959, participation aux résultats en 1967, plan d’épargne salariale en 1967) régulièrement recommencée (pour les plus récentes : loi Pacte de 2019 et loi sur la protection du pouvoir d’achat de 2022) mais jamais terminée.  

A l’invitation du gouvernement, les partenaires sociaux se sont engagés en 2022 dans des discussions sur une « meilleure répartition de la valeur ajoutée entre travail et capital » qui a débouché sur l’ANI du 10 février 2023 relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise. 

Tout en réaffirmant que « le salaire doit rester la forme essentielle de la reconnaissance du travail fourni », les partenaires sociaux ont entendu « dynamiser le partage de la valeur » dans le but de fidéliser, encourager et gratifier des salariés ainsi que d’aligner leurs intérêts avec ceux de l’entreprise. Rendre plus accessibles les dispositifs existants particulièrement au sein des TPE-PME tout en identifiant de nouveaux leviers afin « qu’une prise de responsabilités par le salarié soit reconnue et valorisée par l’entreprise », tels sont les objectifs de l’ANI du 10 février 2023.  

L’entrée en vigueur de l’ANI du 10 février 2023 est subordonnée à son extension (qui n’est pas encore intervenue) ainsi qu’à sa transposition législative laquelle intervient avec la présente loi. Il faudra encore attendre plusieurs décrets d’application pour avoir le dispositif complet.  

En attendant, quelles sont les principales dispositions à retenir de la loi n°2023-1107 du 29 novembre 2023 de transposition de l’ANI du 10 février 2023 ?

Nouveau dispositif d’épargne salariale : le PPVE ou « Phantom Stocks Plan » à la française 

Le plan de partage de la valorisation de l’entreprise (PPVE) est un dispositif original voulu par les partenaires sociaux (article 21 de l’ANI) qui a été mis en place par le législateur et n’est pas sans rappeler les « Phantom Stocks Plan » pratiqués dans les pays anglo-saxons. 

Le PPVE peut être mis en place dans les entreprises ainsi qu’au sein des groupes pour une durée de trois ans. 

Cette mise en place est subordonnée à un rapport spécial du CAC.  

Le PPVE doit prendre la forme d’un accord d’entreprise : un accord entre l’employeur et les représentants d’organisations syndicales représentatives dans l’entreprise, un accord conclu au sein du CSE ou un accord ratifié à la majorité des deux tiers du personnel.  

Tous les salariés ayant au moins un an d’ancienneté dans l’entreprise doivent bénéficier du PPVE (la loi exclut les salariés qui, pendant la durée de trois ans du plan, atteignent l’ancienneté ou quittent l’entreprise de manière définitive). 

Le PPVE permet aux salariés de bénéficier d’une prime de partage de la valorisation de l’entreprise dans le cas où la valeur de l’entreprise a augmenté au cours des trois années.  

La formule de valorisation de l’entreprise est déterminée par l’accord selon l’une des familles de méthodes habituellement utilisées (méthodes d’évaluation patrimoniales, méthodes comparatives, méthodes de rendement, etc.) ; à défaut de formule, la valorisation de l’entreprise est égale au montant de l’actif net réévalué, calculé d’après le bilan le plus récent. Pour les sociétés cotées, la valeur de l’entreprise doit correspondre à sa capitalisation boursière moyenne sur les trente derniers jours de bourse.  

Pour chaque salarié, la prime résulte de l’application à un montant de référence d’un taux de variation de la valeur de l’entreprise, lorsque ce taux est positif. Lorsque ce taux est négatif ou nul, le salarié ne bénéficie d’aucune prime de partage de la valorisation. 

Un montant de référence est fixé pour chaque salarié en application de l’accord. Ce montant peut différer selon les salariés en fonction de la rémunération, du niveau de classification ou de la durée de travail prévue au contrat de travail. Le montant des primes distribuées à un même salarié ne peut, au titre d’un même exercice, excéder une somme égale aux trois quarts du montant annuel du plafond prévu à l’article L. 241-3 du code de la sécurité sociale (PASS 2024 – 46 368 €). 

Les primes issues d’un PPVE sont soumises à une règle de non-substitution à un élément de salaire, elles n’ont pas le caractère d’élément de salaire pour l’application de la législation du travail (donc pas prises en compte au titre des indemnités de rupture en cas de licenciement par exemple) et sont exonérées de l’ensemble des cotisations sociales d’origine légale ou conventionnelle, des participations, taxes et contributions prévues à l’article 235 bis du CGI (participation à l’effort de construction), des contributions au titre de la formation professionnelle et de l’alternance prévue à l’article L. 6131-11 du code du travail mais en revanche elles sont soumises à une contribution patronale au profit de la Caisse nationale d’assurance vieillesse sur le modèle de la contribution prévue pour les dispositifs d’attribution d’option de souscription, d’achat d’action et d’attribution gratuite d’actions pour les salariés.

Entreprise de 50 salariés et plus : une obligation de négocier sur l’augmentation exceptionnelle du bénéfice 

Les entreprises, tenues de mettre en place un régime de participation qui disposent de délégués syndicaux et ont ouvert une négociation pour mettre en œuvre un dispositif d’intéressement ou de participation, doivent négocier également sur la définition d’une augmentation exceptionnelle du bénéfice et sur les modalités de partage de la valeur avec les salariés. Précisons que les entreprises qui ont déjà un accord de participation (ou d’intéressement) doivent engager cette négociation avant le 30 juin 2024.

La définition de l’augmentation exceptionnelle du bénéfice prend en compte des critères tels que la taille de l’entreprise, le secteur d’activité, la survenance d’une ou de plusieurs opérations de rachat d’actions de l’entreprise suivie de leur annulation, les bénéfices réalisés lors des années précédentes ou les événements exceptionnels externes à l’entreprise intervenus avant la réalisation du bénéfice.  

Le partage de la valeur peut être mis en œuvre par le versement d’un supplément de participation, d’un supplément d’intéressement ou l’ouverture d’une nouvelle négociation ayant pour objet la mise en place de l’intéressement si celui-ci n’existe pas dans l’entreprise, d’un abondement dans le PEE ou du versement de la PPV.

Entreprises de moins de 50 salariés : une dérogation à la formule légale de la participation et une prolongation du régime d’exonération de la PPV 

À titre expérimental et pendant une durée de cinq ans à compter de la loi, les entreprises qui ne sont pas tenues de mettre en application un régime de participation mais qui décident de s’y soumettre volontairement, peuvent mettre en application un régime de participation dérogeant à la règle de l’équivalence des avantages consentis, soit par application d’un accord de participation conclu au niveau de la branche soit par accord d’entreprise. 

Toujours dans les entreprises de moins de 50 salariés, entre le 1er janvier 2024 et le 31 décembre 2026, les PPV versées par une entreprise employant moins de cinquante salariés à des salariés ayant perçu, au cours des douze mois précédant leur versement, une rémunération inférieure à trois fois la valeur annuelle du SMIC, sont exonérées de cotisations et contributions sociales ainsi que d’impôt sur le revenu.

Entreprises de 11 à 50 salariés : une obligation d’instituer un dispositif de partage de la valeur 

À titre expérimental et pendant une durée de cinq ans à compter de la promulgation de la loi, les entreprises d’au moins 11 salariés qui ont réalisé pendant trois exercices consécutifs un bénéfice net fiscal (au sens de la participation soit le bénéfice réalisé retenu pour être imposé à l’IR ou à l’IS et majoré de certains bénéfices exonérés en application du CGI), au moins égal à 1 % du chiffre d’affaires et qui ne sont pas tenues de mettre en place un régime de participation, doivent, au titre de l’exercice suivant, soit mettre en place un régime de participation ou d’intéressement, soit abonder un plan d’épargne salariale, soit verser la prime de partage de la valeur prévue à l’article 1er de la loi n°2022-1158 du 16 août 2022 pour la protection du pouvoir d’achat ; cette obligation s’applique aux exercices ouverts après le 31 décembre 2024.

Sécurisation des avances sur intéressement et participation

La loi sécurise (ce qui n’était prévu jusque-là que par une circulaire) la faculté pour l’accord d’intéressement ou de participation de prévoir le versement, en cours d’exercice, d’avances sur les sommes dues au titre de l’intéressement ou de la réserve spéciale de participation.  

Les avances sont versées au bénéficiaire, après avoir recueilli son accord, selon une périodicité qui ne peut être inférieure au trimestre.  

Lorsque les droits définitifs attribués au bénéficiaire au titre de l’intéressement ou de la participation sont inférieurs à la somme des avances reçues, les sommes trop perçues sont intégralement reversées par le bénéficiaire à l’employeur sous la forme d’une retenue sur salaire dans les conditions prévues à l’article L. 3251-3.

Développement de l’actionnariat salarié 

Les plafonds de pourcentage maximal du capital social qui peut être attribué gratuitement sont rehaussés :

  • Le plafond actuel de 10% du capital social pour les GE et ETI passe à 15% ;
  • Le plafond actuel de 15% du capital social pour les micros et PME passe à 20% ;
  • Le plafond actuel de 30% du capital, quelle que soit la taille de l’entreprise, lorsque l’AGA est dite « démocratique », c’est-à-dire qu’elle bénéficie à l’ensemble du personnel salarié de l’entreprise passe à 50% avec un plafond intermédiaire de 30% lorsqu’au moins 50 % du personnel salarié qui représente au moins 25 % du total des salaires bruts en bénéficie. 

Enfin, la loi introduit une possibilité de rechargement du capital plafond maximal de détention du capital social par un salarié.

La présente Actualité n’a pour but que de donner un aperçu de ce qui a retenu notre attention. Elle n’a bien évidemment aucun caractère d’exhaustivité.

Laurent CARRIÉ / Salim OULOUCHE
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