Après être passée au scan du Conseil constitutionnel [Décision n° 2020-807 DC du 3 décembre 2020- conformité partielle], ce qui lui a valu d’être amputée de 26 articles considérés comme des cavaliers législatifs, la loi ASAP [loi n° 2020-1525 du 7 décembre 2020 d’accélération et de simplification de l’action publique] a été publiée au JORF le 8 décembre 2020.
Considérée comme une loi « fourre-tout », elle a initialement pour but de simplifier plusieurs dispositions relatives à la commande publique, aux décisions administratives et aux démarches administratives des français au quotidien.
Mais elle a également introduit des nouveautés dans les relations distributeurs-fournisseurs qui sont applicables pour les négociations commerciales 2021 actuellement en cours.
L’article 125 de la loi ASAP vient prolonger, jusqu’au 15 avril 2023, le régime de rehaussement du seuil de revente à perte pour les denrées alimentaires et les produits destinées à l’alimentation des animaux.
Pour mémoire, les distributeurs sont tenus de fixer le prix de revente de leurs produits au moins 10% au-dessus du prix d’achat effectif et les promotions sont encadrées en volume à 25% et en valeur à 34% dans le cadre de leur revente aux consommateurs.
La nouveauté réside dans la mise en place d’une dérogation s’agissant de l’encadrement en volume des produits saisonniers, définis par le texte comme des produits dont « plus de la moitié des ventes de l’année civile aux consommateurs […] est, de façon habituelle, concentrée sur une durée n’excédant pas douze semaines au total ».
L’obtention de cette dérogation peut également faire l’objet d’une demande par l’interprofession ou par une organisation professionnelle représentant les producteurs ou les fournisseurs des denrées concernées. Cette demande doit être motivée et accompagnée de toutes données utiles pour l’appréciation de la saisonnalité des ventes des produits concernés.
C’est par un arrêté ministériel que sera fixée la liste des denrées ou catégories de denrées alimentaires pour lesquelles le plafonnement en volume des promotions ne sera pas applicable.
Tout manquement à ces dispositions par le fournisseur ou le distributeur est passible d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 75 000 € pour une personne physique et 375 000 € ou la moitié des dépenses de publicité effectuées au titre de l’avantage promotionnel pour une personne morale.
Pour mettre fin à l’opacité des accords internationaux et, en particulier, de la rémunération des centrales d’achats internationales, la loi ASAP a introduit de nouvelles mentions obligatoires dans les conventions uniques.
Conformément au nouvel article L.441-3 III 4° du Code de commerce, doivent à présent figurer dans la convention unique :
« l’objet, la date, les modalités d’exécution, la rémunération et les produits auxquels il se rapporte de tout service ou obligation relevant d’un accord conclu avec une entité juridique située en dehors du territoire français, avec laquelle le distributeur est directement ou indirectement lié ».
Ainsi, les montants versés aux entités internationales relatifs à tout service ou obligation devront être indiqué dans la convention unique, et ce, dès lors qu’ils sont rattachables à des produits mis sur le marché dans une surface de vente d’un distributeur en France.
Cette disposition a été introduite dans le but de faciliter le contrôle des prestations et avantages octroyés aux fournisseurs par les centrales internationales, qui profitaient de l’absence de visibilité sur les rémunérations perçues à l’étranger via les centrales pour contourner les dispositions légales françaises.
Tout manquement relatif à cette disposition peut entraîner une amende administrative d’un montant pouvant aller jusqu’à 75 000 € pour une personne physique et 375 000 € pour une personne morale. Ce plafond étant doublé en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive.
Les pratiques restrictives de concurrence ne seront pas restées longtemps en nombre limité dans le Code de commerce aux articles L.442-1 et suivants.
En 2018, grâce à la loi EGALIM, ces pratiques prohibées étaient passées de 13 à 4, offrant un recentrage opportun sur les pratiques les plus utilisées par les professionnels.
La loi ASAP en ajoute deux autres à l’article L.442-1 3° du Code de commerce, et interdit ainsi :
L’interdiction de la déduction d’office opère en réalité un retour en grâce dans le Code de commerce, après avoir été supprimée lors de la réforme de 2019, qui s’explique par la volonté de simplifier son contrôle, plus complexe à réaliser sous l’égide du déséquilibre significatif.
Cette réintroduction et ses ajouts font suite aux recommandations de la CEPC en matière de pénalités logistiques [Recommandation n° 19-1 relative à un guide des bonnes pratiques en matière de pénalités logistiques] et en matière de conventions uniques dans la grande distribution alimentaire lors de la crise du Covid [Recommandation n° 20-1 concernant les contrats prévus aux articles L.441-3 et L.441-4 du code de commerce et les effets de la crise sanitaire de la Covid-19 dans la grande distribution à dominante alimentaire].
Ces conventions pourront faire l’objet d’un contrôle de l’Administration, chargée de vérifier leur licéité. Pour rappel, tout manquement à ces dispositions est passible d’une amende administrative d’un maximum de 75 000 euros pour une personne physique et 375 000 euros pour une personne morale.