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Actualité
22/11/18

Distribution sélective et vente sur internet : sanction d’un fournisseur dans le domaine des produits de motoculture

1. L’ADLC fait application pour du matériel de motoculture, de la jurisprudence « Coty GmbH c/ Akzente »

L’Autorité de la concurrence (ADLC) a pour la première fois fait application pour du matériel de motoculture, de la jurisprudence « Coty GmbH c/ Akzente1 » rendue par la CJUE dans le domaine des produits cosmétiques de luxe.

Elle a ainsi abandonné le grief initialement notifié aux sociétés Andreas Stihl SAS et Stihl Holding AG & Co KG (ci-après « Stihl ») tenant à l’existence d’une clause interdisant aux distributeurs d’avoir recours à des plateformes tierces pour la distribution des produits de marque Stihl et Viking.

L’ADLC a en effet considéré que cette pratique permet à Stihl, qui n’a aucun lien contractuel avec ce type de plateforme, de s’assurer, de manière à la fois appropriée et proportionnée, que ses produits sont vendus dans des conditions qui préservent son image de marque et garantissent la sécurité du consommateur.

2. L’ADLC sanctionne Stihl au titre d’une entente illicite

L’ADLC a néanmoins sanctionné Stihl au titre d’une entente illicite résultant d’une autre clause du contrat de distribution sélective, interdisant de facto aux distributeurs de vendre les produits sur internet, y compris sur leur propre site.

L’ADLC vérifie en premier lieu le caractère approprié de la mise en place d’un réseau de distribution sélective pour les produits en cause, cette exigence impliquant notamment de s’assurer « s’il n’est pas déjà satisfait à ces objectifs par une règlementation nationale de l’accès à la profession de revendeur ou des conditions de vente du produit en cause »2.

Après avoir considéré que le recours à la distribution sélective pour les produits concernés était justifié du fait de leur degré de dangerosité, l’Autorité a néanmoins estimé qu’en exigeant une remise en main propre à l’acheteur en ligne par le distributeur à l’origine de la vente, impliquant un retrait du produit dans le magasin du revendeur ou une livraison par ce dernier en personne au domicile de l’acheteur, Stihl avait en réalité interdit la vente de ses produits à partir des sites internet de ses distributeurs. Cette disposition interdisait subséquemment la possibilité d’une livraison à distance des produits par un tiers au réseau de distribution sélective, puisqu’un contact direct était obligatoire entre le vendeur et l’acheteur.

Or, la fabrication et la commercialisation des produits susmentionnés sont règlementées par la Directive « machines3 », qui n’exige nullement la transmission d’informations orales par contact direct entre le distributeur et l’utilisateur final, ni la réalisation d’une démonstration à ce dernier. Par ailleurs, la Directive n’interdit pas le recours aux ventes à distance pour ce type de produits.

En conséquence, l’interdiction absolue de recourir à internet pour la vente des produits Stihl apparaît disproportionnée au regard de l’objectif préservation de la santé du consommateur4.

3. L’ADLC considère que cette clause portait atteinte aux ventes passives des distributeurs

L’ADLC a également considéré que cette clause portait atteinte aux ventes passives des distributeurs, ce qui constitue une restriction de concurrence par objet sanctionnée par l’article 101(1) du Traité sur le Fonctionnement de l’Union Européenne (TFUE) excluant tout bénéfice de l’exemption posée par l’article 101(3) TFUE.

Les Lignes Directrices sur les restrictions verticales émises par la Commission européenne précisent en effet que l’utilisation d’un site internet par un distributeur pour vendre des produits est considérée comme une forme de vente passive constituant un moyen raisonnable de permettre aux consommateurs d’atteindre le distributeur5.

Une restriction aux ventes sur internet est dès lors contraire à l’article 4(c) du Règlement d’exemption sur les restrictions verticales6 qui dispose que les accords qui ont pour objet de « restreindre les ventes actives ou les ventes passives aux utilisateurs finals par les membres d’un système de distribution sélective qui agissent en tant que détaillants sur le marché » ne peuvent bénéficier de l’exemption.

La Commission précise à cet égard, que « dans un système de distribution sélective, les distributeurs devraient être libres de vendre, tant activement que passivement, à tous les utilisateurs finals, y compris par internet7 », ce qui n’empêche pas la tête du réseau de distribution sélective de prévoir des conditions spécifiques à l’utilisation d’internet pour vendre ses produits.

Dès lors, bien que l’interdiction des ventes à distance résultant des dispositions du contrat de distribution sélective ait été assouplie à compter de 2014 par l’ajout d’une annexe encadrant les ventes sur internet, l’exigence de remise en main propre du matériel n’a pas été supprimée.

Stihl a ainsi été condamnée à une amende de 7.000.000 d’euros pour avoir mis en œuvre une entente illicite contraire aux articles L. 420-1 du code de commerce et à l’article 101(1) du TFUE de ce fait.

Charline DI GALANTE

1 CJUE, 6 décembre 2017, affaire C‑230/16, Coty Germany GmbH contre Parfümerie Akzente GmbH.

2 §186, citation de l’Arrêt de la CJUE du 11 décembre 1980, NV L'Oréal et SA L'Oréal contre PVBA « De Nieuwe AMCK », affaire 31/80.

3 Directive 2006/42/CE du Parlement européen et du Conseil du 17 mai 2006 relative aux machines et modifiant la directive 95/16/CE, transposée en droit national par le Décret n°2008-1156 du 7 novembre 2008 relatif aux équipements de travail et aux équipements de protection individuelle.

4 L’ADLC précise que son analyse ne porte que sur les produits dangereux. Elle précise que, pour les produits ne présentant aucun caractère de dangerosité, "il ne saurait être question qu’une interdiction de vente en ligne puisse être considérée comme proportionnée et nécessaire" (§ 181).

5 Lignes Directrices sur les restrictions verticales, point 52.

6 Règlement No 330/2010 DE LA COMMISSION du 20 avril 2010 concernant l'application de l'article 101, paragraphe 3, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne à des catégories d'accords verticaux et de pratiques concertées.

7 Lignes Directrices sur les restrictions verticales, point 56.

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