Le juge des référés du Tribunal de grande instance de Paris a rendu aujourd’hui sa décision dans l’affaire « Sarkoleaks » : Patrick Buisson a été condamné à payer à chacun des époux Sarkozy la somme de 10.000 euros provisionnels à titre de dommages et intérêts et le site Atlantico.fr s’est vu interdire sous astreinte de rediffuser les enregistrements réalisés par l’ex-conseiller de Nicolas Sarkozy, qu’il avait mis en ligne, avant de se raviser et de les retirer.
On se souvient que les époux Sarkozy avaient assigné en référé Patrick Buisson ainsi que la société éditrice du site Atlantico et son directeur de la publication, sur le fondement des articles 226-1 et 226-2 du Code pénal.
Pour mémoire, l’article 226-1 du Code pénal incrimine notamment :
« le fait, au moyen d’un procédé quelconque, volontairement de porter atteinte à l’intimité de la vie privée d’autrui en captant, enregistrant ou transmettant, sans le consentement de leur auteur, des paroles prononcées à titre privé ou confidentiel », l’article 226-2 réprimant « le fait de conserver, porter ou laisser porter à la connaissance du public ou d’un tiers ou d’utiliser de quelque manière que ce soit tout enregistrement ou document obtenu à l’aide de l’un des actes prévus par l’article 226-1 ».
Le délit prévu par l’article 226-1 du Code pénal n’étant punissable que si le prévenu a eu la volonté de porter atteinte à la vie privée d’autrui, Patrick Buisson soutenait qu’il n’avait eu aucune intention de procéder aux enregistrements litigieux car son dictaphone aurait été involontairement laissé en état de marche (sic). Il ajoutait au surplus que les propos enregistrés s’inscrivaient dans un cadre strictement professionnel.
Arguments qui ont été balayés d’un revers de plume par le juge des référés, ce dernier ayant estimé qu’il n’était pas sérieusement contestable que l’enregistrement des propos échangés entre Nicolas Sarkozy et Carla Bruni Sarkozy a été effectué à leur insu et que ce n’est pas par inadvertance et de manière involontaire que l’enregistrement a eu lieu, dès lors que Patrick Buisson était en possession d’un appareil dissimulé à la vue de tous.
Il a relevé par ailleurs que dans les enregistrements, il était question des appartements dont dispose le couple Sarkozy, de leurs rapports patrimoniaux respectifs et de leurs relations personnelles.
En conséquence, le juge des référés a considéré qu’il était établi que l’enregistrement litigieux a été obtenu à l’aide de l’un des procédés prévus par l’article 226-1 du Code pénal et que l’atteinte pénale invoquée du fait de sa diffusion au public est susceptible d’être constituée en application de l’article 226-2 du même code, d’autant que la nature attentatoire à l’intimité de la vie privée des époux Sarkozy des propos eux-mêmes ainsi recueillis n’est pas contestable.
D’où l’interdiction prononcée à l’encontre du site Atlantico de rediffuser à l’avenir ces enregistrements.
D’où également l’allocation de dommages et intérêts provisionnels aux époux Sarkozy : comme le relève en effet le juge des référés, même s’il n’est pas établi que Patrick Buisson est à l’origine de la diffusion de ces enregistrements, le préjudice ne consiste pas seulement dans la diffusion des propos, mais bien encore dans leur enregistrement à l’insu des époux Sarkozy.
Le site Atlantico.fr a indiqué qu’il allait faire appel de cette décision.