Dans ses conclusions en date du 7 avril 2016 rendue dans l’affaire C-160/15, l’avocat général près la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), Melchior Wathelet, considère que le lien vers un contenu illicite n’est pas en lui-même constitutif de contrefaçon puisqu’il ne s’agit pas d’un « acte de communication au public » au sens de la directive 2001/29/CE du 22 mai 2001 sur le droit d’auteur.
Dans cette espèce, Sanoma, l’éditeur de la revue mensuelle Playboy a commandé un reportage photographique sur Madame Britt Decker, qui apparaît régulièrement dans des programmes télévisés aux Pays-Bas. GS Media, qui exploite le site internet GeenStij, a publié des annonces et un hyperlien renvoyant les lecteurs vers un site australien où les photos en question étaient mises à disposition sans le consentement de l’éditeur de la revue.
Malgré les sommations de ce dernier, l’exploitant du site a refusé de supprimer l’hyperlien en cause. Saisi en cassation, le Hoge Raad der Nederlanden (Cour de cassation, Pays-Bas) a interrogé la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) pour savoir si le fait de publier un lien hypertexte renvoyant vers une page au contenu illicite (film piraté, etc.) est-il lui aussi illicite.
Tout d’abord, l’avocat général reconnaît que les hyperliens placés sur un site internet facilitent la découverte d’autres sites et des œuvres protégées disponibles sur ces sites offrant par conséquent aux utilisateurs du premier site un accès plus rapide et direct à ces œuvres.
Cependant, les hyperliens qui conduisent vers des œuvres protégées ne les « mettent pas à la disposition » d’un public lorsqu’elles sont déjà librement accessibles sur un autre site et ne servent qu’à faciliter leur découverte. Par conséquent, les hyperliens qui sont placés sur un site internet et qui renvoient vers des œuvres protégées librement accessibles sur un autre site ne peuvent pas être qualifiés d’ »acte de communication » au public au sens de la directive 2001/29/CE du 22 mai 2001.
Pour rappel, dans l’arrêt Svensson c/ Bestwater du 13 février 2014 (C-466/12), la CJUE a dit pour droit que le fait d’établir un lien vers une œuvre protégeable par le droit d’auteur pouvait intervenir sans l’accord du titulaire des droits, sous réserve que cette œuvre soit librement accessible sur un autre site.
Dans cette nouvelle affaire, les conclusions de l’avocat général précisent que la violation du droit d’auteur n’est pas caractérisé peu importe que la source soit licite ou illicite. En somme, un internaute qui publie un hyperlien vers un contenu illicite n’est pas responsable, à l’inverse de celui qui diffuse le contenu vers lequel renvoie ce même lien.
Reste maintenant à voir si les juges suivront les conclusions de l’avocat général, qui ne lient pas le CJUE, ou prendront un chemin différent. L’affaire sera rendue à une date ultérieure.