Suite à une question préjudicielle portant sur l’interprétation de la directive 2005/29/CE du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs (la Directive), la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) a confirmé, par une ordonnance du 8 septembre 2015, que les Etats membres ne peuvent prévoir une interdiction générale des annonces de réduction de prix qui ne feraient pas apparaitre le prix de référence. Il convient donc de procéder à une évaluation au cas par cas afin d’établir le caractère déloyal ou non des annonces de réduction de prix, ces dernières n’entrant pas dans la catégorie des pratiques commerciales déloyales per se listées par la Directive.
En l’espèce, Cdiscount avait été condamnée en première instance et en appel pour n’avoir pas indiqué les prix de référence dans le cadre d’offres d’achat à prix réduits sur son site de vente électronique, ce qui était contraire aux dispositions du Code de la consommation[1] et à l’arrêté du 31 décembre 2008 relatif aux annonces de réduction de prix à l’égard du consommateur (désormais abrogé). Le Tribunal de Police et la Cour d’appel de Bordeaux avaient donc écarté l’argumentation de Cdiscount portant sur la non-conformité de l’arrêté du 31 décembre 2008 à la Directive. La Cour de cassation avait quant à elle décidé de surseoir à statuer et d’interroger à la CJUE afin de savoir si la Directive doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à des dispositions nationales qui prévoient une interdiction générale des annonces de réduction de prix ne faisant pas apparaitre le prix de référence.
Une décision de la CJUE du 10 juillet 2014 avait déjà sanctionné la Belgique pour la non-conformité de sa législation en matière de réductions de prix, laquelle prévoyait la mention d’un prix de référence correspondant au prix le plus bas appliqué durant le mois précédant l’annonce. Suite à cette décision, et du fait de la similarité des réglementations française et belge sur ce point, le Ministre de l’Economie avait pris les devants et abrogé l’arrêté du 31 décembre 2008 par un arrêté du 11 mars 2015 relatif aux annonces de réductions de prix à l’égard du consommateur (l’Arrêté), ce afin de se conformer au droit communautaire.
L’Arrêté du 11 mars 2015 offre désormais aux commerçants la possibilité de déterminer librement le prix de référence[2]. Toutefois, cet Arrêté prévoit toujours une obligation d’indication d’un prix de référence lors des annonces de réduction de prix. Or, il ressort désormais clairement de l’ordonnance du 8 septembre 2015 que les dispositions nationales qui prévoient une interdiction générale des annonces de réductions de prix sans faire apparaitre le prix de référence ne sont pas conformes au droit communautaire. Malgré les modifications opérées, le cadre réglementaire français semble donc toujours contraire au droit communautaire.
[1] Article L.113-3 du Code de la consommation dans sa version antérieure à la loi du 6 août 2015
[2] Article 2 de l’Arrêté de 2015: "le prix de référence […] est déterminé par l’annonceur". L’article 2 de l’arrêté de 2008 fixait quant à lui seulement quatre prix de référence possibles : (i) le prix le plus bas pratiqué dans les 30 jours précédant la publicité, (ii) le prix conseillé par le fabricant ou l’importateur du produit, (iii) le prix maximum résultant d’une disposition de la réglementation économique, (iv) le dernier prix conseillé par le fabricant ou l’importateur lorsque le produit annoncé à prix réduit n’a pas été vendu ou proposé à la vente dans l’établissement ou sur le site de vente à distance.