« L’année 2018 a été un bon cru pour les investissements étrangers en France » a déclaré Bruno Le Maire, ministre de l’Économie et des Finances, en janvier dernier. Cette amélioration de l’attractivité française est l’occasion de faire le point sur l’état actuel de la réglementation en matière d’investissements étrangers sur le territoire français, qui s’apprête à être modifiée par l’entrée en vigueur du projet de loi PACTE.
En principe, selon l’article L.151-1 du Code monétaire et financier, les relations financières entre la France et l’étranger sont libres1. C’est le cas des investissements réalisés dans les secteurs non-sensibles qui ne nécessitent qu’une simple déclaration statistique.
Par exception, certains investissements étrangers sont soumis à une autorisation préalable. Cette dernière s’accompagne d’une déclaration administrative2. La procédure d’autorisation préalable est prévue si trois conditions cumulatives sont remplies :
Un récent décret n°2018-1057 du 29 novembre 2018 a complété la liste des secteurs relevant de la procédure d’autorisation. Aussi, depuis le 1erjanvier 2019, sont notamment concernés des « secteurs d’avenir » tels que la recherche et le développement dans certains secteurs lorsqu’ils portent sur la cybersécurité, l’intelligence artificielle, la robotique, la fabrication additive (procédé de fabrication par ajout de matière), les semi-conducteurs et les biens et technologies à double usage (qui peuvent être utilisés tant à des fins civiles que militaires, comme les armes de destruction massive)3 ; ainsi que l’activité d’hébergement de données dans certaines circonstances4.
Il convient de noter que la définition de l’opération soumise à autorisation préalable et la liste des activités sensibles varient selon que l’investissement provient d’un État membre de l’Union européenne ou d’un État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ; ou d’un État tiers.
En cas de doute, il convient de saisir le ministre de l’Économie d’une demande écrite aux fins de savoir si un investissement est soumis ou non à une procédure d’autorisation, tout en sachant que la société cible peut également solliciter un rescrit5.
Le projet de loi PACTE (plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises) est en cours de négociation et devrait entrer en vigueur sous 3 mois. Il comporte des mesures variées en droit des affaires, notamment des dispositions modifiant la réglementation en matière d’investissements étrangers en France.
De ce fait, l’article 55 du projet de loi vise à étendre les pouvoirs du ministre de l’Économie.
En cas de réalisation d’un investissement étranger en France sans autorisation préalable, le ministre de l’Économie aura le pouvoir (1) d’enjoindre à l’investisseur étranger de déposer une demande a posteriori, (2) de modifier l’opération (3) ou encore de rétablir la situation antérieure.
Le ministre pourra également assortir son autorisation de conditions à respecter, sous peine de retirer l’autorisation et d’imposer à l’investisseur de solliciter une nouvelle autorisation. L’efficacité de ce dispositif sera renforcée par la possibilité pour le ministre de prononcer ces injonctions sous astreinte.
Le ministre aura, d’autre part, la possibilité de prendre des mesures conservatoires, telles que :
Enfin, des sanctions pécuniaires plus lourdes pourront être prononcées par le ministre de l’Économie.
Il reste donc désormais à observer si la mise en œuvre de ces mesures permettra bien d’aboutir à un équilibre satisfaisant entre un mécanisme d’encadrement soucieux de protéger les intérêts nationaux et la préservation de l’attractivité française.
1 Article L.151-1 du Code monétaire et financier
2 Depuis le décret n°2017-932 du 10 mai 2017
3 Article R.153-2, 13° nouveau
4 Article R.153-2, 14° nouveau
5 Décret n°2018-1057 du 29 novembre 2018 modifiant la procédure de rescrit prévue à l’article R.153-7 du Code monétaire et financier