Le 16 janvier dernier, la DGCCRF a apporté une modification substantielle à ses lignes directrices relatives à l’encadrement des promotions en valeur, dispositif issu de l’Ordonnance du 12 décembre 2018 prise en application de la loi dite « Egalim ».
Cette nouveauté fait écho aux offres récemment proposées par certains distributeurs consistant à offrir, pour l’achat d’un produit, un produit différent mais similaire. En effet, les ventes avec primes sont exclues du dispositif de l’Ordonnance et ne sont donc pas soumises à l’encadrement des promotions.
Les nouvelles lignes directrices maintiennent cette exclusion des offres « d’un produit différent, y compris alimentaire, pour un ou plusieurs produits identiques achetés (vente avec prime) », mais cette exclusion s’applique désormais « sous réserve que les deux produits liés ne puissent pas être considérés comme similaires dans le cas où l’avantage procuré par la prime serait supérieur à 34% de la somme de ces deux produits ; à titre d’exemple, deux bouteilles de champagne, qu’il soit brut, demi-sec ou doux, blanc ou rosé, un foie gras entier et un bloc de foie gras, des blancs de poulet et des cuisses de poulet, sont considérés comme des produits similaires ».
Selon l’administration, dès lors qu’une vente avec prime consiste à offrir une bouteille de champagne brut pour l’achat d’une bouteille de champagne demi-brut, la bouteille offerte ne doit pas représenter un avantage supérieur à 34% de la somme de ces deux produits.
Au-delà du caractère très contestable de lignes directrices à géométrie variable, cette nouvelle précision va à notre sens bien au-delà des exigences posées par l’Ordonnance et viole le droit européen.
L’Ordonnance du 12 décembre 2018 dispose, en son article 3, que « I. – Les dispositions du présent article s’appliquent aux avantages promotionnels, immédiats ou différés, ayant pour effet de réduire le prix de vente au consommateur de denrées alimentaires ou de produits destinés à l’alimentation des animaux de compagnie.
II. – Les avantages promotionnels, le cas échéant cumulés, mentionnés au I, accordés au consommateur pour un produit déterminé, ne sont pas supérieurs à 34 % du prix de vente au consommateur ou à une augmentation de la quantité vendue équivalente ».
Précisément, une vente avec prime n’a pas pour objet de réduire le prix de vente d’un produit, ce qui justifie son exclusion du dispositif légal. En apportant cette modification, non seulement la DGCCRF ajoute au texte, mais elle adopte une position manifestement contraire à la Directive 2005/29/CE du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs. Cette dernière prévoit en effet une liste exhaustive de pratiques commerciales réputées déloyales en toutes circonstances, qui s’applique dans tous les États membres, qui ne peut être modifiée qu’au travers d’une révision de la Directive et qui n’interdit pas en soi les ventes avec prime.
À défaut de présence dans cette liste, toute pratique commerciale doit faire l’objet d’une analyse afin de déterminer si elle remplit les conditions pour être considérée comme déloyale (contrariété à la diligence professionnelle et altération substantielle du comportement du consommateur).
À n’en pas douter la position de l’administration fera l’objet de débats en cas de contentieux devant les juridictions.