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Actualité
7/4/14

Chronique de droit de la communication - 7 avril 2014

La musique n'adoucit pas les mœurs !

Durant les élections municipales, des détournements de clips musicaux au profit de partis politiques ont fleuri sur Internet.

Le chanteur Jean-Jacques Goldman en a fait les frais. Sa chanson « Tu es de ma famille » a été reprise et les paroles détournées en faveur du maire sortant de Levallois-Perret, Patrick Balkany. Le chanteur a réclamé et obtenu que le clip litigieux soit retiré du site Internet sur lequel il avait été publié.

Mais c’est surtout la chanson « Happy » de Pharrell Williams et son clip réalisé par le collectif de jeunes réalisateurs « We are from L.A.« , qui ont été les plus détournés, au profit de différents candidats aux élections municipales.

Les sympathisants des candidats sont ainsi filmés en train de brandir des pancartes « We are from [Argenteuil par exemple !] », le tout avec le morceau « Happy » en fond sonore.

Ces détournements constituent-ils une contrefaçon des droits d’auteur attachés au clip musical « HAPPY », ou une contrefaçon de la marque semi-figurative n° 3786532 « We are from L.A. » déposée par le collectif de vidéastes ?

Du point de vue du droit d’auteur, la question est de savoir si les détournements en cause bénéficient de l’exception de parodie établie par l’article L.122-5 du Code de la propriété intellectuelle, Le jeu de cette exception permettrait de soustraire ces adaptations au monopole des auteurs du clip « HAPPY » sur l’exploitation de leur œuvre.

La jurisprudence a établi que la parodie est caractérisée lorsqu’il existe: :

  • Une intention humoristique : la parodie doit avoir pour « dessein de moquer » et de « tourner en dérision pour faire rire ou sourire » (CA Paris 18 fév. 2011, n°09/19272)
  • Une absence de confusion entre l’oeuvre parodiée et l’oeuvre qui parodie

En l’espèce, il est évident que les détournements ne créent aucune confusion avec le clip initial, qui a connu une diffusion planétaire. Là où le bas blesse est que, dans certains cas, l’intention humoristique semble céder le pas devant le but de promotion politique . L’objectif principal de ces détournements était-il de faire rire, ou de mettre en avant de manière ludique le candidat et son équipe en vue des élections municipales ?

Du point de vue du droit des marques, est interdit, sauf autorisation du propriétaire, l’usage de la marque pour des produits ou services identiques à ceux désignés dans l’enregistrement (L.713-2 du Code de la propriété intellectuelle).

Mais l’usage en cause doit être un usage à titre de marque, qui réalise la fonction essentielle de la marque, à savoir identifier l’origine commerciale de produits et services.

Ne constitue pas un tel usage l’usage d’un signe en tant que titre, permettant de désigner une œuvre (CA Paris, 25 janvier 2006 s’agissant du conflit entre le titre de film « Tout peur arriver » et la marque éponyme), l’usage d’un signe à des fins caricaturales ou humoristiques (cf. les célèbres affaire Areva et Esso) ou encore l’usage d’un signe à des fins purement descriptives.

En l’espèce, les usages de l’expression « We are from … » aux fins de désigner des œuvres, à savoir les détournements litigieux, ne sont pas susceptibles de constituer des usages à titre de marque, et donc une contrefaçon de la marque du collectif de vidéastes « We are from L.A.« .

Plus généralement, les titulaires de la marque « We are from L.A. » ne pourront pas, sur le fondement de cette marque, s’opposer à l’usage des seuls termes « We are from…» (i.e. « nous sommes de… ») lorsque ceux-ci seront utilisés dans leur acception courante.

L’UFC Que Choisir s'en va-t'en guerre contre les réseaux sociaux

Facebook, Twitter et Google + ont été assignés mardi 25 mars 2014 devant le Tribunal de grande instance de Paris par l’UFC Que Choisir.

L’association de défense des consommateurs reproche aux trois géants des réseaux sociaux de ne pas respecter le droit de la consommation ni la loi informatique et libertés.

Elle a en effet dénoncé depuis juin 2013, dans une mise en demeure qu’elle a fait parvenir aux trois opérateurs, l’absence de clarté dans leurs conditions générales d’utilisation et un abus en matière de collecte de données personnelles.

À la suite des ces mises en demeure des discussions sont intervenues entre l’UFC Que Choisir, Facebook, Twitter et Googl +, mais aucun accord n’a été trouvé.

L’association affirme que les conditions sont « inaccessibles, illisibles » et que « la collecte, la modification, la conservation et l’exploitation des données des utilisateurs » est très largement octroyée aux détenteurs des réseaux sociaux sans que l’accord particulier de l’utilisateur ne soit sollicité.

L’association demande devant le Tribunal de grande instance de Paris « la suppression ou la modification de la myriade de clauses litigieuses imposées par ces sociétés ».

Quelles règles en droit français les réseaux sociaux ne respecteraient-ils pas ?

Le droit de la consommation implique que le consommateur puisse avoir accès sur un support durable aux conditions générales d’utilisation. C’est l’article L120-1 du Code de la consommation qui établit l’interdiction des pratiques commerciales trompeuses.

L’Article 6 de la loi informatique et liberté du 6 janvier 1978 modifiée énonce de plus :

« Un traitement ne peut porter que sur des données à caractère personnel qui satisfont aux conditions suivantes :
1° Les données sont collectées et traitées de manière loyale et licite ;
2° Elles sont collectées pour des finalités déterminées, explicites et légitimes (…) ».

L’article 32 de la même-loi impose quant à lui que le consommateur ait donné son consentement pour le recueil de ses données personnelles.

L’issue du litige apportera des réponses sur la faculté d’agir en France contre ces acteurs dont le siège social est situé en Californie.

Tintin : l'admirer oui, le citer Non !

La diffusion sur internet, par deux journalistes, de cases issues de la bande dessinée « Tintin » a fortement déplu aux Editions Moulinsart.
Sur leur compte Twitter et leur blog Tumblr « Le petit XXIe », ces deux journalistes utilisaient des cases des œuvres de Hergé afin d’illustrer des faits d’actualités.

La Maison d’édition Moulinsart, gestionnaire des droits d’auteurs de la bande dessinée, leur a demandé de retirer ces images.
Les deux journalistes ont alors invoqué l’exception de courte citation.

La courte citation est une exception au droit d’auteur.

La personne effectuant la courte citation n’a effectivement pas besoin, dans ce cadre, de solliciter l’autorisation de l’auteur pour utiliser l’œuvre.

L’article L.122-5 du Code de la propriété intellectuelle dessine les contours juridiques de cette exception :

« Lorsque l’œuvre a été divulguée, l’auteur ne peut interdire : (…) 3° Sous réserve que soient indiqués clairement le nom de l’auteur et la source : a) Les analyses et courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information de l’œuvre  à laquelle elles sont incorporées ; (…) ».

Pour bénéficier du jeu de l’exception de courte citation, plusieurs conditions doivent être respectées. En particulier, la citation doit :

  • Respecter le droit de paternité de l’auteur : le nom de l’auteur et la source de la citation doivent être mentionnés. A défaut la citation sera constitutive d’une atteinte au droit moral de l’auteur.
  • Être courte : La reproduction ou la représentation d’un extrait de l’œuvre ne peut bénéficier de l’exception que si la citation est courte au regard de l’œuvre citée et au regard de l’œuvre citante.  Il s’agit d’une appréciation au cas par cas, par le juge.
  • Être justifiée par un caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information de l’œuvre  à laquelle elles sont incorporées : « il est de principe que les citations ne sont licites que si elles servent à éclairer ou étayer une discussion, un développement ou une argumentation formant la matière principale de l’ouvrage lui-même« » (TGI Paris, 11 févr. 1988).

Les Éditions Moulinsart ont soutenu que l’exception de courte citation n’est pas applicable en l’espèce.

En effet, chaque case ne constituerait pas un extrait de la bande dessinée mais une œuvre à part entière. La citation ne serait pas courte puisque toute l’œuvre toute entière serait citée. En fait, il n’y aurait pas de citation du tout. La Maison Mounlinsart s’appuie sur la jurisprudence précédemment rendue dans des affaires concernant la fameuse bande dessinée.

La Cour d’appel de Versailles a ainsi retenu concernant les vignettes de la bande dessinée « Tintin » (CA Versailles, ch. 12, sect. 1, 17 sept. 2009) que :

« Que ces vignettes, individualisées, sont des œuvres graphiques à part entière, protégeables en elles-mêmes, indépendamment de l’ensemble et de l’enchaînement narratif dans lequel l’auteur les a intégrées ; que ces vignettes constituent des reproductions intégrales de l’œuvre d’HERGE ;
Considérant que cette reproduction intégrale ne peut pas relever de l’exercice du droit de courte citation prévu par l’article L122-5-3° du Code de la propriété intellectuelle ; ».

Deux autres arrêts de la Cour d’appel de Versailles et de la Cour d’appel de Paris ont jugé dans le même sens que les vignettes de la bande dessinée « Tintin » constituaient des œuvres à part entière. (CA Versailles, Ch. 12, sect. 1, 17 sept.2009 – n° 08/04297 ; CA Paris, Ch. 4, sect. A, 14 mars 2007, n° 06/03307).

Les vignettes n’ont pour l’instant pas été retirées du compte Twitter « Le petit XXIe« .

En revanche, Tumblr a supprimé les images à la demande des ayants-droits.

Pierre DEPREZ / Côme CHAZAL / Clémentine CARLET
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